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Plateforme Total en mer du Nord : sept questions sur une fuite

Depuis dimanche 25 mars, Total ne parvient pas à stopper une grave fuite de gaz sur sa plateforme d'Elgin Franklin, en mer du Nord.

Le Monde

Publié le 29 mars 2012 à 21h17, modifié le 30 mars 2012 à 08h57

Temps de Lecture 6 min.

L'accident d'Elgin, en mer du Nord, n'avait causé aucune victime ni provoqué de dégâts environnementaux majeurs - hormis l'émission accrue de gaz à effet de serre.

Depuis dimanche 25 mars, Total ne parvient pas à contenir une grave fuite de gaz sur sa plateforme d'Elgin-Franklin, en mer du Nord. "C'est le plus gros incident pour Total en mer du Nord depuis au moins dix ans", a reconnu un porte-parole du groupe. Jeudi 29 mars, la situation était "stabilisée", mais la fuite est loin d'être colmatée.

  • Que sait-on de cette plateforme ?

Située à 240 km à l'est d'Aberdeen (Ecosse), la plateforme d'Elgin-Franklin est l'une des plus importantes installations de la major française. Plus de deux cents salariés y travaillaient au moment de l'accident. La plateforme est posée sur une profondeur d'eau de 93 mètres, alors que le réservoir exploité se trouve à plus de 5 kilomètres sous le fond de la mer. 130 000 barils d'équivalent pétrole y sont produits chaque jour, soit 2,6 % de la production de Total. 60 000 barils vont au groupe français, le reste à ses partenaires, notamment l'italien ENI. Total compte une vingtaine de plateforme pétrolière en mer du Nord. A partir de trois gisements principaux (Elgin, Franklin, Alwyn), de multiples champs adjacents (Jura, West Franklin, Islay...) ont été exploités afin de rentabiliser au maximum les infrastructures sous-marines.

Les plateformes de Total et de ses partenaires en mer du Nord
  • Quelles sont les particularités de ce gisement ?

"Elgin-Franklin fera date dans l'histoire de l'industrie pétrolière", déclarait Christophe de Margerie, alors directeur général de la division exploration et production de Total, lors de la présentation du gisement au début des années 2000. Et pour cause, le site concentre les défis technologiques. Elgin est un gisement dit "HP-HT", autrement dit haute pression et haute température (190 ºC). Les réservoirs enfouis à 5 300 m sont comme de gigantesques cocottes-minute. La pression y atteint 1 100 bars, l'équivalent d'un poids de plus d'une tonne sur l'ongle d'un pouce. De plus, le gaz, comme les condensats (pétroles très légers), sont acides et corrosifs en raison d'importantes teneurs en dioxyde de carbone et sulfure d'hydrogène. Autant de contraintes que Total avait surmontées pour mettre au point ces gisements en production, en faisant "une référence mondiale".

  • D'où provient la fuite ?

Après quatre jours de recherche, Total a réussi à localiser jeudi la source de la fuite. Elle provient d'un puits désaffecté à 4 000 mètres de profondeur. "Ce que nous savons, c'est que la fuite provient d'un puits désaffecté, un puits qui a été bouché il y a un an, dans une formation rocheuse à 4 000 mètres de profondeur", a expliqué une porte-parole.

  • Quelles solutions sont envisagées pour la colmater ?

Total indiquait jeudi qu'il examinait toujours toutes les possibilités pour colmater la fuite. "Nous sommes toujours dans une phase d'évaluation des solutions", a déclaré un porte-parole. Une première solution a été avancée mardi, celle du creusement d'un puits de secours pour faire baisser la pression du puits principal. Une opération qui prendrait environ six mois. Une intervention sur la plateforme elle-même, plus rapide et sans doute moins coûteuse, semble pour l'instant écartée car exposant la vie des techniciens. Enfin l'hypothèse la plus optimiste voudrait que la fuite s'arrête d'elle-même.

  • Existe-t-il un risque d'explosion ?

Mardi, le directeur de la santé, de la sécurité et de l'environnement chez Total, David Hainsworth, a reconnu qu'un risque d'explosion existait. "Le gaz est inflammable, mais l'alimentation électrique a été coupée sur la plateforme pour minimiser le risque d'étincelle, toutefois il est évident qu'il y a un risque", a-t-il admis sur la BBC. D'autant que la torchère, la haute tour métallique servant à brûler les déchets de gaz naturel est encore allumée. Néanmoins, "le vent pousse le panache de gaz dans une direction opposée à celle de la torchère. Et selon les prévisions météorologiques, il va souffler dans la même direction pendant cinq à six jours", a-t-il ajouté. Alors que certains experts mettent en avant les risques d'explosion si les vents changent de direction, Total l'écartait mercredi. La torchère "fait partie intégrante du système de sécurité" et "ne pose pas de risque immédiat".  Jeudi, si les conditions météo restaient favorables, un nuage de gaz était néanmoins observé à moins de 100 mètres de la torchère encore en activité.

  • Quels moyens sont mis en œuvre dans la zone ?

Dès lundi, les autorités britanniques ont décidé de mettre en place une zone d'exclusion maritime de 2 milles marins (3,7 km) autour de la plateforme et d'en interdire le survol à moins de 5,5 km, le nuage de gaz pouvant s'enflammer à tout instant. Jeudi, deux navires transportant des équipements anti-incendie ont pris position près de la plateforme. Un autre navire, avec à son bord un robot sous-marin équipé d'une caméra destiné à inspecter son état, est aussi sur place.

  • Existe-t-il des risques pour l'environnement ?

"Les premières indications montrent qu'il n'y a pas d'impact significatif sur l'environnement", indiquait mardi le groupe. Pourtant, la fuite a provoqué la formation d'un nuage de gaz mais également un épanchement de liquide, entraînant la formation en mer d'une nappe fine d'hydrocarbures. Repérées par un avion de surveillance, des irisations témoigneraient de la présence de boues de forage et de produits légers associés au gaz. Cité par le Guardian, Martin Preston, spécialiste de la pollution marine, indique que "la libération de méthane représente un risque d'explosion très important", mais que c'est aussi "un gaz"acide, contenant du sulfure d'hydrogène, très toxique pour l'homme et la vie aquatique. Une hausse de la mortalité des poissons, très localisée, ne peut être exclue". Simon Boxall, océanographe à l'université de Southampton,"acide, contenant du sulfure d'hydrogène, très toxique pour l'homme et la vie aquatique. Une hausse de la mortalité des poissons, très localisée, ne peut être exclue". précise que"acide, contenant du sulfure d'hydrogène, très toxique pour l'homme et la vie aquatique. Une hausse de la mortalité des poissons, très localisée, ne peut être exclue".

  • Des problèmes avaient-ils déjà été constatés sur ce puits ?

Comme l'on rapporté des journaliste du Monde, l'association écologiste norvégienne Bellona a reçu le témoignage d'un responsable des syndicats de salariés travaillant dans l'offshore britannique. Ce dernier affirme que Total avait déjà rencontré d'importantes difficultés, et à de nombreuses reprises, sur ce puits. Au point d'avoir pris la décision, il y a quelques semaines, d'essayer de le "tuer". Entre 2009 et 2010, Elgin-Franklin avait déjà été épinglée pour des fuites de gaz et de pétrole (déversement de 4 600 kg d'hydrocarbures au total) et des défaillances de sécurité.

D'autres installations voisines ont également connu des incidents. Le plus grave a eu lieu le 6 juillet 1988 avec l'explosion de la plateforme gazière de Piper Alpha, qui a causé alors la mort de 167 personnes (62 survivants). Et entraîné un renforcement des normes et des consignes de sécurité. Mais la réalité est bien différente, tant les défaillances des équipements, souvent vétustes, sont monnaie courante dans la région. En 2011, d'après l'organisme britannique de contrôle de la sécurité, la sûreté à bord est insuffisante pour 96 % des installations en mer du Nord et 20 % d'entre elles montrent de "sérieuses défaillances". Le Guardian révélait dans le même temps que des déversements importants et dangereux de pétrole ou de gaz se succèdent depuis des années, au rythme d'un par semaine, et ce dans la discrétion la plus totale."acide, contenant du sulfure d'hydrogène, très toxique pour l'homme et la vie aquatique. Une hausse de la mortalité des poissons, très localisée, ne peut être exclue".

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