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Rem Koolhaas perd une tour à Pékin

L'architecte néerlandais avait signé la tour annexe de la télévision, détruite par un incendie le 10 février.

Par Frédéric Edelmann

Publié le 13 février 2009 à 16h56, modifié le 13 février 2009 à 16h56

Temps de Lecture 3 min.

Un étrange monolithe gris et glacé a pris la place de la torchère qui, dans la nuit du 9 au 10 février, a illuminé l'ultramoderne quartier d'affaires de Pékin. Un incendie a embrasé les 160 mètres de la tour TVCC abritant des locaux de la télévision nationale. Les flammes sont montées vers le ciel, elles ont même dépassé l'autre tour, à côté, nommée CCTV (China Central Television) et ses 234 mètres, aux formes sans précédent : deux objets imbriqués en une sorte d'arche - elle est devenue, avec le stade olympique en forme de nid, un des symboles du nouveau Pékin.

Ces deux tours, TVCC et CCTV, sont deux constructions complémentaires dues à l'architecte néerlandais Rem Koolhaas - un des plus prestigieux au monde - et l'Allemand Ole Sheeren, son partenaire dans l'agence OMA (Office for Metropolitan Architecture). Les deux structures semblent finies mais ne sont pas encore en activité : CCTV doit abriter quelque quarante chaînes nationales ; la défunte TVCC et ses 29 étages devaient accueillir le siège de leur direction commune, un grand auditorium, une série de studios et un hôtel de luxe de 241 chambres.

"POULET GRILLÉ"

La tour principale est restée tapie dans l'ombre durant les cinq heures qu'a duré l'incendie, au cours d'une nuit heureusement sans vent. Elle ne semble même pas avoir souffert des chaleurs terribles, bien que les deux tours ne forment théoriquement qu'un seul ensemble relié par un socle.

Un capitaine des pompiers serait la seule victime connue, à supposer que quelques gardiens ou visiteurs du soir ne se soient pas trouvés dans la tour enflammée. Quand le feu a pris, à 20 h 27, une fumée noire se dégageait déjà du sommet depuis de longues minutes. L'incendie est donc parti du toit avant de se propager aux étages inférieurs. Il a été provoqué par un formidable feu d'artifice réalisé à la demande de CCTV pour célébrer la fin des festivités du Nouvel An lunaire. La télévision officielle, qui a filmé le spectacle, n'a pas écouté les avertissements de patrouilles de police. "Le responsable de CCTV est à l'origine du sinistre. Il a violé les réglementations et allumé un feu d'artifice sur un site de construction", a déclaré Zhu Xu, porte-parole de la municipalité.

Selon Luo Yan, porte-parole des pompiers, le feu d'artifice était comparable à un spectacle professionnel avec plusieurs centaines de fusées. Les dirigeants de CCTV ont présenté leurs excuses mais ce n'est pas suffisant. La police de Pékin a annoncé, jeudi 12 février, l'arrestation d'un haut responsable de la télévision et de onze autres personnes.

Pour Jérémie Descamps, architecte français qui suit la croissance de Pékin, "le feu d'artifice a été réalisé au pire moment, lorsque le chantier est en cours de livraison : les matériaux, mobiliers, sont en place mais que les systèmes antifeu ne sont pas encore en fonction. C'est une période très courte, mais des plus délicates".

TVCC avait à peu près les proportions du Palais des Congrès de Paris, la rigidité en moins et une manière de se déhancher qui lui avait valu, selon la tradition chinoise, le surnom de "dafei ji", expression salace qui désigne autant une partie de l'homme qu'un poulet en son entier (CCTV a pour surnom "Da kucha", le grand caleçon).

Bien grillée, la volaille ! Il ne reste de la tour qu'une carcasse composite (acier et béton), d'autant plus spectaculaire qu'elle est restée debout. La tour 7 du World Trade Center - qui avait pris feu lors de l'attentat de 2001 - s'était, elle, effondrée. Toutefois, il ne fait guère de doute que TVCC devra être détruite. Rem Koolhaas ne s'exprimera pas avant la fin de l'enquête.

Moins scientifiques, des jugements rituels ont surgi. Certains estiment qu'il y avait un mauvais "rapport" entre les deux tours. D'autres pensent qu'un incendie survenant durant la période de transition du Nouvel An serait de très bon augure. Il existerait même une phrase à prononcer dans ce genre de circonstance : "Honghong Huohuo." Un jeu de mots sur le feu et la joie qu'il apporte.

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