Les gaz de schiste font bondir l’investissement industriel aux Etats-Unis
Les Etats-Unis vont investir 400 milliards de dollars dans les cinq années à venir grâce aux gaz de schiste et créer jusqu’à 5 millions d’emplois.
Les chiffres ont de quoi faire rêver un Vieux Continent à l’économie atone. Selon le cabinet de conseil américain ATKearney, les gaz de schiste vont stimuler 400 milliards d’euros d’investissements industriels d’ici à 5 ans aux Etats-Unis, principalement répartis entre l’énergie et la chimie.
Ces deux secteurs sont les premiers bénéficiaires car la production d’un puits de gaz de schiste se décompose en gaz naturel (90% environ), éthane, propane, butane et pétrole. Si les trois derniers sont indexés sur les cours mondiaux du brut et suivent donc une tendance haussière, les deux premiers, le gaz et l’éthane, voient leur prix chuter. Le gaz, c’est l’énergie. L’éthane, la chimie.
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sourceLa production d’électricité connaît un véritable retournement. Le parc américain de centrales au charbon affiche une puissance de 305,7 gigawatts (GW), dont près de la moitié est issue d’installations âgées de 40 à 80 ans. Les électriciens doivent arbitrer entre l’engagement de lourds travaux de rénovation ou la construction de nouvelles centrales… au gaz. Un arbitrage devenu facile : 40 milliards de dollars de nouveaux projets de centrales à gaz sont déjà en cours. Et comme le gaz émet moins de CO2 que le charbon, "les Etats-Unis vont respecter les engagements de Kyoto (sur les réductions d’émissions de CO2) sans rien faire pour", s’amuse Hervé Wilczynski, associé du bureau de Dallas.
Plus compétitif que la Chine !
Dans la chimie, le prix de l’éthane est en dessous de 10 dollars le MBTU (l’unité de mesure standard de volume de gaz) outre-Atlantique, contre presque 5 dollars au Moyen-Orient et 14 dollars en Chine. "Les Etats-Unis sont plus compétitifs que la Chine sur une matière première !", s'exclame David Richard, associé du bureau de Paris. 40 milliards d’euros d’investissements dans des craqueurs d’éthylène sont déjà d’actualité. "La chimie européenne va être noyée entre la compétitivité du Moyen-Orient et celle des Etats-Unis", alerte Hervé Wilczynski.
Au total, le gaz de schiste américain va générer 200 milliards de dollars d’investissements dans l’amont (forage, exploitation…) et presque 200 milliards dans l’aval, répartis comme suit : 75 milliards dans la production d’électricité, 50 milliards pour la liquéfaction de gaz, 40 milliards dans l’industrie chimique, et 20 milliards dans les infrastructures gazières. Avec, à la clé, selon ATKearney, 250 milliards d’euros de valeur économique ajoutée d’ici à 2020 et la création de 1,8 million emplois directs. En comptant les emplois induits dans toute l’industrie, ce chiffre grimpe à 5 millions.
Des prix du gaz intenables pour les pétroliers
Ces prévisions sont toutefois soumises à une certaine incertitude : l’évolution des prix du gaz en Amérique du Nord, aujourd’hui intenables pour l’industrie pétrolière. L’afflux de gaz de schiste a fait tomber les cours en-deçà de 3 dollars le MBTU. Un prix bien inférieur au seuil de rentabilité des producteurs. Seuls les puits coproduisant du pétrole et des huiles liquéfiées gagnent de l’argent. "C’est la coproduction qui maintient l’activité gaz de schiste aux Etats-Unis", lance même Hervé Wilczynski. Ce déséquilibre économique persiste alors que les pétroliers américains ont diminué de 60 % en deux ans leurs frais de forage.
Les prix devraient doucement remonter grâce à l’exportation de gaz à partir de terminaux de liquéfaction. Ils pourraient se stabiliser en 2020 autour de 6 à 8 dollars le MBTU. Mais aujourd’hui, la fabrication de ces terminaux de liquéfaction fait débat. Les pétroliers poussent en ce sens, les chimistes s’y opposent pour maintenir des prix bas. Par ailleurs, une partie de la classe politique considère que le gaz naturel, comme le pétrole brut, est une ressource stratégique qui ne doit pas être exportée. Le résultat de l’élection présidentielle sera déterminant. Les Républicains poussent vers l’exportation alors que les Démocrates visent un maintien des prix bas sur le territoire national. Un dilemme auquel nombre de dirigeants européens aimeraient être confrontés.
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